Cette lettre, intéressante à plus d’un titre, fut adressée par Cheikh Ahmadou Bamba à Samba Laobé, roi du Djolof, et constitue une importante exhortation à la relativisation de la puissance terrestre et à l’évocation constante des Réalités Immuables de l’autre vie. Le Serviteur du Prophète fait, à travers ce texte, une lecture assez frappante de la destinée humaine en général, de la précarité de la puissance terrestre et de l’exigence d’en user à bon escient en vue du bien-être du peuple. Leçon de Vérité ne saurait assurément être plus limpide…
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J'invoque la Protection de DIEU contre Satan, le lapidé. Au Nom de DIEU, le CLEMENT et MISERICORDIEUX. Certes DIEU est mon Maître.
La Louange soit à DIEU qui fut toujours et qui ne cessera jamais d'être.
Que la Paix et le Salut soient accordés au Prophète Muhammad, le Seigneur de tous les rois et de leurs ministres, le Maître de tous les hommes et de toutes les femmes. Que ce salut soit étendu aux membres de sa Famille et à ses Compagnons qui surent se départir des imperfections pour accéder à l’excellence.
Ceci dit, cette missive est destinée à Samba Laobé, roi du Djolof, et émane de Ahmad ibn Muhammad Mbacké, le serviteur de DIEU, son MAITRE ABSOLU et dont il se suffit entièrement, qui lui transmets ses salutations les plus parfaites et les plus honorables.
Je te fais savoir que j'ai bien reçu la lettre que ton émissaire devait me transmettre et dans laquelle tu me fis parvenir tes salutations et sollicitas auprès de moi des recommandations et exhortations ; raison pour laquelle je t'adresse ces mots-ci :
Sache que le pouvoir que tu détiens actuellement en ce monde ne t'est parvenu qu'après avoir été soustrait des mains d'autres rois semblables à toi qui t'ont précédé. Et qu'un jour viendra où ce même pouvoir te sera repris des mains pour être cédé à d'autres rois comme toi qui te succéderont. Par conséquent, s'il arrive certains jours où la vie te semble favorable et t'assiste contre tes adversaires, sache qu'il pourrait bien en être d'autres où elle favorisera tes adversaires contre toi. Et si souvent elle t'a fait rire, quelques fois aussi elle te fera pleurer. Que donc la joie qu'elle t'inspire ne t'abuse pas car ce monde est, par nature, trompeur et fourbe. Et il arrive souvent qu'il se retourne brutalement contre toi pour te leurrer et te faire tomber dans son piège.
Aussi, je te recommande de toujours persévérer à assister les plus faibles, les pauvres et les nécessiteux, et de ne jamais tomber dans la tyrannie et l'injustice car « tout homme injuste le regrettera un jour» et « tout tyran assurera sa propre perte ».
N’oublie jamais que la puissance que tu détiens et toutes les faveurs qui en découlent ne te sont, en vérité, parvenues qu’à travers la mort d’autres personnes qui les détenaient avant toi et du fait que ces mêmes faveurs se sont départies de ces dernières pour de bon. Par conséquent, attends-toi à ce que ces mêmes privilèges te délaissent un jour de la même façon qu’ils te sont parvenus. Fais donc preuve de persévérance dans les actes qui te seront utiles dans les deux mondes, ici-bas et dans l’Au-delà, avant que tu sois, un jour, obligé de tourner définitivement le dos à ces avantages ou bien que ceux-ci se détournent à jamais de toi.
C’est ici que s’achèvent les recommandations que je te donne ; si jamais tu consens à t’y conformer, ce sera à ton profit, autrement… «Nous appartenons tous à DIEU et c’est vers Lui que nous retournerons » …


Cette lettre historique fut adressée par le Cheikh à un membre de la dynastie royale (avec qui il était lié) à l'occasion de la disparition de sa mère. Son contenu s'avère, à plusieurs titres, éminemment instructif en ce sens qu'il constitue une vive interpellation pour tout mortel investi d'un quelconque pouvoir ici-bas et une injonction à tout savant à ne jamais faillir au rappel de la Vérité Intangible. Au cours de cette leçon de Tawhîd que nous dispense ici Khadimou Rassoul, l'on retiendra surtout que mors ultima ratio (la mort est la raison finale de toute chose)…

Au Nom de DIEU, le CLEMENT, le MISERICORDIEUX. Certes, DIEU est mon MAITRE.
Ô SEIGNEUR ! Accorde la Paix et le Salut à Ton Noble Envoyé. La Louange soit à DIEU, le VIVANT Qui ne meurt jamais, l’ETERNEL dont la Royauté subsiste. Puissent ensuite Ses Bénédictions être répandues sur notre Maître Muhammad, qui dissipa les doutes, sur les Siens, sur ses Compagnons et sur tous ceux qui perpétuent leur œuvre de délivrance…
Ceci dit, reçois de ma part la plus excellente des salutations en même temps que mes déférentes [condoléances], à l'occasion du décès de ta mère dont la nouvelle nous est parvenue - puisse DIEU, le TOUT-PUISSANT, l'ABSOLUTEUR, nous favoriser, ainsi qu'elle, de Sa Miséricorde... Il ne te reste donc désormais qu'à prier pour le repos de son âme et à accomplir des œuvres de bienfaisance en sa faveur pour le restant de ta vie.
Il t'incombe également [de ce jour] de tourner résolument ton dos aux vains plaisirs de ce monde, par un sincère repentir consistant à délaisser toute chose répréhensible au regard de la Shari'a - fut-elle hautement louée par la société - pour te diriger énergiquement vers les choses agréées par la Loi de DIEU- fussent-elles ouvertement condamnées par les gens. Saches que ce qui a fait disparaître ta mère, de sorte que tu ne puisses plus la voir aujourd'hui, te dérobera très certainement un jour à la vue des tiens. Saches aussi que, pour ce qui est de l'Ange de la Mort, ne peuvent le repousser ni régiments de gardes, ni pléthore de fusils ou de lances… Rappelle-toi donc des gardes de ton parent Silmakha DIOP et de ceux de ton neveu Samba Laobé ; rappelle-toi leurs cargaisons de fusils… Réussirent-ils le moins à s'interposer entre eux et l'Ange de la Mort ? Evoque aussi les puissantes armées de tes aïeuls, celles de tes pères et celles de leurs prédécesseurs…
Veille donc à renouveler constamment ton repentir, en rendant les biens injustement acquis à leurs ayants droit légaux et en demandant pardon au SEIGNEUR. Si jamais tu disposes de dettes auprès des créatures, prends soin de t'en acquitter car tu ne seras quitte avec elles qu'à la condition de restituer pleinement leurs droits [matériels et moraux]. Pour ce qui regarde, à présent, le beau fixe de tes rapports avec DIEU, [il s'acquiert] à travers ta sincère quête de Son Pardon et ton réel repentir auprès de LUI. Hâte-toi donc de libérer ton cou du carcan des droits des musulmans avant que ne t'advienne la mort ! Saches enfin que ne te seront profitables auprès de ton SEIGNEUR [à l'Au-delà] que les actes exclusivement accomplis en vue de Sa Face Sublime.
Ceci constitue l'Absolue Vérité ne souffrant aucune sorte d'objection.
Si tu consens à agir en conséquence…"Alhamdu li Lâh" (La Louange revient à DIEU).
Dans le cas contraire…"Inna li Lâhi wa inna ileyhi râjihoûn " (C'est de DIEU que nous procédons et c'est vers LUI où nous retournerons).
L'auteur de ces recommandations en ta faveur est le plus indigent d'entre les indigents de ceux qui aspirent à DIEU - son MAITRE, ce SEIGNEUR Qui Se Suffit à LUI-MEME en dehors de quoi que ce soit d'autre - se prénommant Ahmad ibn Muhammad MBacké. Puisse DIEU, le TRES-HAUT, agir à son endroit à travers Ses Attributs d'Infinie Compassion, LUI le DETENTEUR DE L'INDULGENGE…

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